samedi 16 mai 2015

En poursuivant « La flûte des vertèbres » de Vladimir Maïakovski, 1915.-Guy Kauffmann

Mais l’homme avec son âme, ses lèvres, ses os n’est que le creuset vain de nos espoirs fracassés, et ces phrases qui tourbillonnent au bout de nos langues gonflées, déchirées d’avoir supporté tant d’errance et de mensonge, titubent et s’effondrent au bord des chemins de pensée. Il y a cependant derrière nos lèvres carmin, tâchées des fruits gorgés d’étoiles de nos amours déçus, comme une litanie de revolvers chargés, ces armes qui sont entre deux cris, deux baisers et deux vies, capables de faire exploser les mots, convulser les vivants et ramener les morts de l’horizon qui file.
Il nous faut arracher le désir de nos cœurs fétides, pour le contempler, flétri, pantelant, et le laisser crever. Et puis, il faut dormir, comme ils disent, car la mer est l’ultime recours, la matrice éternelle où tu ne viendras plus me poursuivre, faite de dix mille petites morts, jusqu’à la dernière, au bord de la transe glacée, de la voie bleutée qui mène là où tous les parfums se mêlent, où la mémoire se diffuse, où l’être se brise en une heure si pleine qu’elle ne sonne plus à aucune horloge.

Je regarde mes doigts qui me font comme un tas de chair rance cueillie sous la rosée, et la sueur qui coule dans mes cheveux épars me rappelle nos années d’amours banales, quand nos regards s’étreignaient vainement, quand la peau de ta hanche douce comme la cire glissait sur ma bouche, mais il ne faut pas que tu m’écrives, il ne faut pas jurer que tu m’aimes peut-être, car je sais que tu ne reviendras pas, je l’ai lu dans le reflet tremblant de tes cils d’argent, laisse moi à mon ivresse solitaire , laisse moi mordre le temps au rythme de mon pouls qui, lentement, s’essouffle.

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