“Quel bonheur“ se dit-il “tout un festin préparé pour moi !“. Bêlant de joie, il courut vers la luzerne, s’y roula et brouta tout son saoul, jusqu’à ce qu’un grondement sourd lui fasse lever la tête : devant lui, un mouton d’une espèce inconnue le regardait fixement.
“Quelle belle toison grise tu as“ dit Grégoire au nouveau venu. “Partage mon repas, si tu veux“. L’autre ne répondit rien. “C’est de bon cœur, vas-y, je vois bien que tu te lèches les babines“. D’autres grondements lui répondirent, venant de tous les côtés. Grégoire se retourne, ils sont dix, quinze peut-être, ces drôles de moutons gris, aux oreilles pointues et aux poils plus rêches que sa toison. “Oh, mais vous êtes nombreux, faites bien attention de partager, tout le monde doit avoir sa part !“.
Le cercle des moutons gris se resserra autour de Grégoire “Bonjour, bonjour à tous, je suis heureux de vous avoir rencontrés…“ Soudain Grégoire se rendit compte que son troupeau à lui, sa famille, n’apparaissait plus nulle part dans le paysage “Avez-vous vu mon troupeau, dites ? Des moutons blancs, comme moi ?“ Les grondements se firent ricanements : “Ah, c’est un jeu ? Je veux bien jouer avec vous, mais pas trop longtemps, je dois rentrer – Ah, mais vous m’étouffez, ce n’est pas la peine, je n’ai pas froid… “.
Fort tendrement, les loups l’embrassèrent, le mordillèrent, puis le déchiquetèrent gaiement, et chacun emporta un morceau de ce bon Grégoire en souvenir de cette belle rencontre.
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