vendredi 14 novembre 2014

En regardant un tableau de Rembrandt- Guy Kauffmann

À quoi penses-tu vieil homme effondré sous le poids de cet escalier sans fin, qui est le labyrinthe anthracite de la noirceur qui suinte le long de tes lourdes pensées, accrochées, éventrées sur le vélin de ce livre vain, que tes yeux embués de larmes d'impuissance contemplent d’ inanité ?

Serre bien tes mains aux phalanges asséchées, vieillard flétri par une vie que tu n'as jamais chérie, à la lumière chiche du jour qui agonise, tu t'effondres avec un soupir chuintant sous les tissus empesés, mordorés de ta robe d'apparat qui ne distrait plus la morne servante du feu flageolant de ton âtre, qui agite d'un poignet  hoquetant les braises mal éteintes d'une flamme qui n'a jamais vraiment été soleil, car l’innommé va être libéré, il va percer la porte noire des ténèbres adipeuses, des voûtes résonnantes qui l'ont retenu trop longtemps au cœur de ta pensée, et cette vis sans fin le long de laquelle ta philosophie s'est échinée n’y pourra rien.

Réjouis-toi vieil homme, le crépuscule est le meilleur moment de l’âme, celui de la vérité nue dévorante.


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